Par rapport aux années 70, la population d’éléphants a décliné de 70%. Chaque année, jusqu’à 30 000 éléphants sont abattus illégalement par les braconniers, tant pour leur peau que pour leur ivoire. En Afrique centrale, on dénote -62% d’éléphants en seulement 9 ans, et au Mozambique et en Tanzanie respectivement -48% et -60% en 5 ans. Ce sont les marchés de l’ivoire (décoration et bijoux) qui créent cette demande et sont à l’origine de ce trafic transnational. Pour tirer profit de cette demande, les réseaux criminels s’impliquent de plus en plus activement dans le commerce illégal de l’ivoire. Le WWF estime à 25 millions de dollars les pertes de revenus touristiques causées chaque année en Afrique par le braconnage de l’éléphant. À ce rythme d’extermination, dans 15 ans, il n’y aura plus d’éléphants sauvages en Afrique. En Europe, la Commission européenne a pris, fin 2021, des dispositions pour mettre un terme au commerce de l’ivoire dans l’Union européenne, mais certaines exceptions perdurent ; quant à l’Asie, aucune mesure n’est prise pour combattre activement ce trafic. Une autre difficulté réside dans le fait que ces bandes sont organisées à l’échelle internationale et agissent donc par-delà les frontières. Elles échappent facilement aux sanctions dans le pays d’origine. Et lorsqu’une bande est localisée, la peine est généralement dérisoire. « Sauvons la forêt » a par exemple obtenu des informations provenant d’un entretien réalisé avec l’administration du Parc national des Virunga, indiquant que les braconniers arrêtés sont relâchés au plus tard après trois jours. À cela s’ajoute le fait que les bandes et les marchands agissent de manière de plus en plus subtile. Les os et la fourrure sont éliminés afin d’empêcher toute identification de l’éléphant. La viande est vendue comme viande de bœuf ou de chèvre. Un autre problème est la déforestation des forêts vierges par des multinationales qui viennent le plus souvent de l’étranger, notamment chinoises. La sophistication des infrastructures de déboisement des forêts permet non seulement aux braconniers de pénétrer toujours plus loin dans les forêts protégées, mais les employées des compagnies achètent également de la viande pour leur propre consommation ou pour la revendre à un prix plus élevé dans les villes et villages environnants. Il s’agit d’une information essentielle car l’on se rend compte que les secteurs d’exploitation se soutiennent mutuellement et sont à l’origine d’une prospérité commune.

En Thaïlande, les éléphants d’Asie sont capturés dans leur milieu naturel dès le plus jeune âge. Les éléphants sont des animaux sociaux très protecteurs de leur progéniture. L’éléphanteau de l’un est aussi celui de tous les autres pachydermes du groupe, et leur instinct de conservation est l’un des plus forts du monde sauvage. 1 à 4 éléphants sont ainsi communément abattus pour capturer un seul éléphanteau. Une fois capturé, l’éléphanteau subit une technique de dressage appelée le phajaan, afin de lui faire oublier ses instincts élémentaires. Un éléphanteau soumis (qui a donc vécu le phajaan) vaut entre 15 000 et 20 000 $. L’éléphant d’Asie est ainsi enfermé durant plusieurs jours dans une petite cage. L’animal est ensuite sorti pour être enchaîné. Il est sous-nourri et peut être selon les moyens mis à disposition du « dresseur », électrocuté, étouffé, et/ou frappé (aux oreilles, sur la tête, aux articulations, sur les joues et le sexe), avec un marteau ressemblant à un pic à glace. Environ un animal sur deux meurt au cours du phajaan, les survivants en gardent les traumas toute leur vie et porteront sur leur dos des touristes sans repos ; ils bénéficieront de soins précaires. Ils resteront attachés à une chaîne en fer de 2 m de long environ quand ils sont inactifs, et subiront des coups s’ils se rebellent. Tout ce que l’éléphant fera pour le touriste n’est pas naturel : porter des rondins de bois, faire du football, peindre avec sa trompe (dont il a besoin pour respirer). Dans la nature, un éléphant mange 200 kilos de nourriture et boit 200 litres d’eau par jour en 18 heures. On comprend donc pourquoi ce business est une torture. Au début du XXème siècle, on comptait environ 100 000 éléphants en Thaïlande. Aujourd’hui, on estime qu’il en reste un peu moins de 5 000 (la moitié étant « domestiqués »). À ce rythme, la race pourrait disparaitre d’ici 30 ans.

En Europe, les éléphants des cirques ont la particularité d’avoir été enlevés bébés, alors que leurs parents étaient abattus pour leur ivoire. Il s’agit d’une donnée essentielle car l’on s’aperçoit encore une fois que les réseaux criminels ont un champ d’action exponentiel et que, oui, le trafic de l’ivoire engendre aussi d’autres types d’exploitation des éléphants. Les cirques, tout comme les zoos, se sont servis dans la nature jusque dans les années 80 et ce au prix d’abattages, d’agonies lors du transport, et de privations de toutes sortes. Loin d’avoir uniquement souffert du traumatisme d’avoir été arraché à leur famille, les éléphanteaux sont isolés et détenus dans des structures itinérantes : les éléphants passent leur vie attachés et enfermés dans des remorques pendant les transports. Un cirque sillonne jusqu’à 10 villes par mois, ce qui représente des milliers de kilomètres chaque année et de longues heures durant, sans eau ni nourriture. À cela s’ajoute la promiscuité avec d’autres espèces comme les tigres ou les primates, l’interaction forcée avec le public, la musique et les applaudissements bruyants ainsi que des lumières agressives lors des représentations. Cette situation est d’autant plus inquiétante que les éléphants sont des animaux d’une grande sensibilité sensorielle et émotionnelle, comparable aux orques. La Fédération des vétérinaires d’Europe, qui regroupe 46 organisations dans 38 pays, recommande l’interdiction de l’utilisation d’animaux sauvages dans les cirques en déclarant dans un communiqué de presse en date du 06 juin 2015 : « Leurs exigences physiologiques, mentales et sociales ne peuvent être atteintes de manière adéquate ». Aujourd’hui, seulement 23 pays ont interdit les cirques avec animaux (dont 9 pays européens). Rappelons-le : Non seulement les cirques ne participent actuellement à aucune conservation ou préservation des espèces, mais en plus ils ont eu, à l’instar des zoos, leur part de responsabilité dans le dépeuplement des écosystèmes. Actuellement, l’utilisation de l’animal comme un bien consommable, que l’on prive de ses libertés, et que l’on exhibe, ne fait qu’encourager indirectement l’exploitation qui perdure dans la nature.